Ce manuscrit en latin, rédigé entre 1085-1086, est l’un des fleurons de l’histoire anglo-normande. Réalisé à la demande de Guillaume le Conquérant dans le but d’établir des taxes foncières, il s’agit de l’inventaire des terres anglaises et de leurs propriétaires. Composé de deux ouvrages indépendant, le Little Domesday et le Great Domesday , les informations compilées par les contrôleurs faisaient autorité. Les pages consacrées à l’East Sussex figurent dans ce dernier. 

Pour chaque fief, les possessions royales sont d’abord présentées, puis viennent celles du clergé et ensuite des propriétaires comme les barons. Les biens des femmes et des serviteurs du roi sont présentés par la suite. Les villes sont également mentionnées et donnent de précieuses informations sur les impôts prélevés. 

Afin de réaliser cet inventaire, ce sont dans un premier temps les sheriffs qui sont chargés de collecter les informations, puis dans un second temps, des officiers royaux se rendent dans chaque comté pour effectuer des vérifications.

La chronique anglo-saxonne décrit très précisément ce long travail, mal perçu par la population : « Le roi envoya ses hommes à travers toute l’Angleterre, dans chaque comté ; ils devaient compter le nombre de hides (tenures familiales) dans chaque comté, quelle quantité de terre ou de bétail le roi lui-même avait dans le pays, quelles redevances lui étaient dues annuellement dans le comté. Il fit évaluer aussi l’étendue des terres que possédaient ses archevêques, ses évêques, ses abbés et ses earls, la quantité de terre ou de bétail possédée par quiconque occupait une terre dans le royaume, et leur valeur en argent. Cette enquête fut menée si rigoureusement que pas un seul hide, pas un yard de terre, pas un bœuf, une vache ni un porc ne fut oublié ; il est honteux de le relater, mais il semble que le roi n’ait pas eu honte de le faire.».

Sans équivalent dans le monde anglo-saxon, ce manuscrit est très précieux par la richesse des informations contenues permettant une analyse politique, sociale et culturelle.  Conservé avec le Trésor de la Couronne à Winchester, il fut déplacé à Westminster avant d’être déposé aux Archives Nationales, à Kew, où il est exposé. 

 

La page concerne les terres de Guillaume de Varenne et le Bourg de Lewes ; elle peut se traduire comme suit : 

 

LE BOROUGH OF LEWES TRE [au nom du Roi Edouard] a rendu 6 livres 4 shillings et  1 ½ penny provenant des loyers et des douanes. Le Roi Edouard avait là 127 bourmestres dans le domaine. Leur coutume était que, si le roi souhaitait envoyer ses hommes patrouiller la mer sans lui, ils collectaient  20 shillings auprès de tous les hommes quel que soit le propriétaire de la terre, et les personnes chargées des armes et les navires les avaient.

Quiconque vend un cheval dans le bourg donne au préfet 1 penny et l’acheteur en [donne] un autre; pour un bœuf ½ penny ; pour un homme, quel que soit le lieu dans le rape où il puisse l’acheter, 4 pence. Un homme qui fait couler le sang verse une amende de 7 shillings et 4 pence. Un homme qui commet un adultère ou un viol verse une amende de 8 shillings et 4 pence, et une femme autant. Le roi a [l’amende de] l’homme adultère, l’archevêque [celle] de la femme.

À un fugitif, s’il est repris, 8 shillings et 4 pence.

Quand la monnaie est renouvelée, chaque monnayeur donne 20 shillings.

De toutes ces sommes, 2 tiers appartenaient au roi et le troisième au comte.

Maintenant le bourg rend au total autant qu’avant et 38 shillings en plus.

 

[1] Litte Domesday : Petit Domesday, comprenant les terres de Norfolk, Suffolk et de l’Essex

[2] Great Domesday : Grand Domesday, concerne tous les autres territoires, sauf les comtés du Nord. 

 
Bibliographie : 
  • Michel de Boüard, Guillaume le Conquérant, Fayard, 2010.
 
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